Publié dans Le Progrès social n°2603 du 10/03/2007
Les soldats du feu sont très appréciés par l’ensemble de la population. Ils arrivent à égalité avec les infirmières, premiers ex aequo, dans la représentation du métier qui requiert du courage, du dévouement, de l’altruisme, de la disponibilité.
Ces hommes et depuis peu ces femmes sont pensés d’une puissance à toute épreuve parce que le feu est un élément qui terrifie et qu’ils le combattent en sortant toujours victorieux, quelque fois au péril de leurs vies. Le second élément, l’eau, où le sauvetage des presque noyés et le repêchage des noyés sont parfaitement maîtrisés et qu’ils défient la mort, la côtoient dans les accidents de tous genres. Ceux de la route, ceux dits domestiques.
Allô le 18, il y a quelqu’un sur un toit ! Les pompiers sont là. La mobilisation générale lors d’évènement catastrophiques ( tremblements de terre, cyclones, crash aérien, accident collectif) les rassemblements festifs (concert, carnaval, manif) les sortent peu de leur quotidien de « Prêts à partir. »
L’urgence, ils connaissent, à l’instar du SAMU, sauf qu’ils sont en première ligne. Ces professionnels du sauvetage font partie de l’univers sécurisant de chacun. En cas de malheur et de difficulté, ils sont toujours là. Le summum de leur générosité s’aperçoit dans le don de globules blancs pour les cancéreux notamment. En cas de pénurie quand une demande tout public n’atteint pas le quota escompté, ils sont sollicités. Le système consiste à prélever le sang du donneur en circuit fermé et à le lui restituer délesté d’un nombre de globules blancs qui au bout de quelques heures se refont. La machine est impressionnante, l’opération fatigante et éprouvante. C’est ainsi qu’il est recommandé de peser un peu plus de cinquante kilos et que la contribution d’homme fort est requise. Bénéficier de globules blancs de cette qualité accélère certainement la guérison.
Depuis un an, la profession ne cesse d’étaler des revendications dans le plus grand respect d’une population toujours secourue avec autant de zèle. Leurs conditions de travail inacceptables doivent être dénoncées. Chaque pompier propriétaire d’uniforme ramène à son domicile le linge à laver de façon ordinaire. La base de l’hygiène consiste à traiter les équipements vestimentaires dans des locaux adéquats, par un personnel formé. Que prévoit la réglementation concernant ces vêtements tachés quelque fois de sang ? Entrent t-ils dans la catégorie du linge susceptible d’être contaminé et obligé de faire l’objet d’un traitement particulier comme le linge hospitalier ou non ?
Gérer la pénurie semble être le lot des institutions publiques. La rareté des draps comme au CHU parfois, demande de l’ingéniosité aux intervenants au chevet de personnes blessées, souffrantes. Heureusement que les états de choc nécessite l’emploi du papier d’alu doré et cache l’impudeur des corps non recouverts.
Que faire ? Doit-on se munir d’un drap ou deux de son trousseau personnel, déposé dans le coffre de sa voiture en prévision d’accident ?
Le drap est un symbole de protection comme le toit d’une maison. Il procure du réconfort quand la main douloureuse l’attrape et le serre, signe d’énergie dans le refus de la mort. Il cache la béance des plaies aux yeux des curieux friands d’horreur. Il rassure, réchauffe, isole. Les temps anciens d’un unique drap de dessous sont révolus. A minima, une literie se compose de deux draps et d’une taie d’oreiller. Le droit à un drap pour un corps sur la chaussée est obligatoire. Rien que pour cela, les pompiers pourraient être en grève.
Les secours dans les meilleures conditions ne tiennent aucunement compte de la vétusté des ambulances utilisées. Malgré les six nouvelles, l’usure avancée des autres en service n’est pas digne de la qualité des interventions des professionnels et des volontaires.
-Le pompier volontaire est celui qui occupe un emploi dans une catégorie professionnelle proche du médical ( aide-soignant, infirmier) ou non (enseignant, chauffeur routier.) Il donne de son temps après avoir reçu une formation. Il partage les missions des plus chevronnés et au besoin renforce les équipes. Il fait profiter ses proches de son savoir quand surgit l’imprévu douloureux et traumatique -.
Le ramassage, brancardage transport des corps jusqu’au service des urgences peut prétendre à un équipement moderne et performant, autant pour le sauvetage. Dans ce domaine aussi le matériel obsolète, défectueux, ne fonctionne pas toujours. Par exemple le respirateur, la machine suppléant le poumon, qui en cas d’incendie et de suffocation permettrait de sauver des vies, n’est qu’un objet non opérationnel.
Les pompiers bien-aimés le disent et le re-disent. Les promesses d’il y a un an n’ont pas été tenues. Même si les catastrophes ne sont pas innombrables, même si les incendies donnent le temps aux occupants de se propulser au dehors, une des caractéristiques du sauvetage est d’avoir à portée de main du matériel opérationnel. Cela suppose une vérification réglementaire et son remplacement en cas de dysfonctionnement. Le feu et les flammes se combattent et s’éteignent. L’eau pour ce faire est un élément indispensable. Depuis longtemps des bouches d’incendie bien visibles jalonnent les communes. Elles doivent être accessibles au SDIS ( Service Départemental Incendie et Secours.) Il est interdit aux voitures d’en bloquer l’accès. Elles débordent parfois, inondant la chaussée faisant démonstration qu’elles sont pourvoyeuses d’eau. En principe, il devrait en avoir partout.
Par manque de moyens, par négligence, par oubli peut-être, à certains endroits les bouches d’incendie sont inexistantes. Les pompiers sont incapables dans une telle situation de maîtriser le feu. Qui est responsable de ce manquement ? Existe-t-il une procédure pénale capable de dédommager les victimes d’une faute aussi grave ? Certes, la facilité consiste à se renvoyer la balle d’accusation en dénégation. Les habitants touchés par le malheur sont peu procéduriers ; ils ne s’informent pas de leurs droits. Ils ignorent aussi que l’impuissance à agir mine le pompier, le renvoie à un sentiment d’inutilité, le retourne tête baissée à la caserne.
Un bon ouvrier a de bons outils. Sa dextérité et son habileté se trouvent renforcés par la performance des instruments. Si ces derniers sont de mauvaise qualité, le rendement ne sera plus le même et le savoir-faire en subira les conséquences. Sa compétence et son excellence ne sont pas en cause, mais il sera le premier à être mortifié par les résultats obtenus.
A long terme, l’érosion de la satisfaction distillera du déplaisir, entraînant un désinvestissement de la tâche. La perte de l’estime de soi, la permanence du doute vont générer ou une sensation de lassitude généralisée ou de l’agressivité. Le sentiment de ne pas être compris, de ne pas être entendu dans les revendications de demande d’équipements, ajoute à cet état du bon ouvrier à l’outil défectueux, l’absence de reconnaissance. En outre, le mépris affiché s’agissant du sauvetage de la population les atteint de plein fouet, eux qui ne sont que dévouement et altruisme.
La grève de février a permis de sensibiliser la population qui pensait les choses réglées depuis longtemps. La découverte d’un tel dénuement au sein d’une institution dont la vocation est de sauvegarder la vie, surprend. Elle est le révélateur de grandes négligences.
Le SDIS a un président qui est maire. Il a promis un budget de trois milliards d’Euros cette fois. La proximité des élections présidentielles ne joue pas de rôle dans ses promesses, se plaît-on à penser. La déclaration est sérieuse et sera certainement suivie d’effet, puisque chose promise chose due.